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La Notation, pour quoi faire ?

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Dans l'univers de la musique actuelle, la musicalité, le swing et le groove sont devenus les éléments les plus importants du discours musical. Ceci ne date pas d'hier, cette émergence coïncide avec la valorisation de l'interprète en tant que protagoniste de l'?uvre musicale, et ce phénomène est apparu en correspondance avec la possibilité de pérennité de l'?uvre par le biais de l'enregistrement.

En effet avant l'invention du magnétophone ou du cinéma, une interprétation musicale ou théâtrale se perdait à jamais dès qu'elle était finie. Il est clair que la seule chose qui restait à perpétuité était l'?uvre écrite du compositeur ou de l'auteur. Celui-ci était le seul protagoniste, le seul qui avait droit à la postérité. Les autres, les interprètes, ne vivaient que dans la mémoire de ceux qui les avaient connu. Le XXème siècle, avec ses inventions, est venu changer les choses. Avec le gramophone et le cinéma, les interprètes pouvaient passer désormais à la postérité.

Il a émergé de cette technologie «l'?uvre d'interprète» dans laquelle le compositeur, tel que dans le jazz, n'est qu'un créateur originel qui accorde à l'interprète un thème autour duquel il peut créer réellement et improviser, devenant de cette façon le vrai créateur de l'?uvre. Dans le théâtre, avec l'improvisation collective, les interprètes devenaient aussi protagonistes et commençaient à créer leurs propres ?uvres. Dans le cas qui nous préoccupe, la musique, la partition jusqu'à alors outil essentiel de communication entre le compositeur et ses interprètes devenait de moins en moins indispensable. Ces nouvelles tendances ont influencé aussi la façon d'apprendre la musique. Dans le jazz, et dans tous les nouveaux courants la tradition orale est obligatoire, la musique s'enseigne surtout à travers l?oreille et de nouveaux éléments tels que la musicalité, le swing, le groove (impossible à transmettre à travers une partition écrite) commencent à prendre le devant de la scène. De nos jours et dans la musique des jeunes qui l'ont découvert à travers les nouvelles technologies, la partition en tant qu'élément de communication est devenue totalement inutile. En effet il est plus explicite pour faire connaître une ?uvre de la faire écouter que de la faire lire.

Le « sans-solfège », tant décrié dans les milieux orthodoxes, loin d'être une tare, est pourtant un atout qui révèle l'existence d'un vrai musicien capable d'apprendre à travers son organe légitime: l'oreille. Beaucoup de musiciens, sans oreille (voire sans talent), sont cautionnés par les conservatoires traditionnels et par la « culture » officielle par le simple fait d'être capables de reproduire avec une technique plus ou moins spectaculaire toutes les notes et toutes les nuances indiquées par le compositeur dans la partition. Les orchestres symphoniques, les théâtres d'opéra et les émissions de télévision cultissimes sont pleins de ces singes savants.

Telle est l'importance de ces faits qu'une histoire drôle circulait dans le San Francisco des années 70 : Sam et Ben, deux musiciens de jazz discutent : «- Dis-moi Ben, pourquoi les musiciens classiques lisent tous des partitions quand ils jouent ? - Parce que chez les musiciens classiques, il y a plus de sourds que d'aveugles ! ». De nos jours, beaucoup de musiciens n'utilisent la partition que pour écrire les relevés pour le dépôt SACEM. Et cette limitation dans la capacité solfégique n'est pas un handicap pour faire de la bonne musique. Michel Berger dans un entretien accordé à Jacques Chancel à France-Musique disait un jour : « Je suis en train de désapprendre le solfège ». Ce qui était légitime car les 90 % de son langage musical faisaient partie de ce qu'on ne peut pas transmettre à travers la partition. Apprenez à un homme qui n'a jamais entendu de musique classique à jouer du piano et le jour où il s'attaquera à une partition de Mozart, vous ne la reconnaîtrez pas. Car il y a dans toute cette transmission culturelle beaucoup de tradition orale. Je me demande même si Mozart lui-même reconnaîtrait une de ses ?uvres jouée par un pianiste actuel en suivant les indications des maîtres à penser de la musicologie. Tellement le « groove » mozartien est sans doute perdu à jamais dans le silence des générations et impossible à être transmis par la notation écrite.

Cependant nous allons dans ce cours récupérer l'importance de la partition écrite. Et je peux vous dire « Vous êtes des bons musiciens sans le solfège, avec le solfège tardif vous serez mieux que ceux qui l'ont eu dès le début ». Bienheureux les sans-solfège car ils seront les élus de la muse.

La partition est donc :

  1. Un outil de communication
  2. Un outil de déclaration des droits sur une ?uvre.

Et il y a une nouvelle utilisation. La partition est un outil d'analyse. Un passage comme celui ci :

Dont chaque partie est comme ça :

C'est impossible à faire avec ses dix doigts sur un clavier. C'est un effet dont la logique est très simple. Il s'agit de :

  1. Faire une gamme chromatique (par demi-tons) ascendante
  2. On ajoute à chaque fois une nouvelle note à l'accord
  3. Tous les accords ainsi constitués sont des accords par tons.

C'est un type de raisonnement que seule la partition permet de suivre.


Pour finir. Il y a un type de composition différent en fonction du support qu'on utilise. La musique de ceux qui composent au piano est différente de la musique de ceux qui composent à la guitare qui est différente de ce celle composée en chantant et en s'accompagnant à la guitare. De même, la MAO est différente selon le logiciel utilisé. Nous allons essayer de faire bouger en peu les choses pour que la plupart des choix soient possibles. Je veux tout d'abord dans le prochain chapitre vous asséner un peu de solfège mais avec une approche différente qui vous permettra de le maîtriser plus vite.

Faites les exercices car c'est la seule façon pour que vous puissiez comprendre les chapitres suivants.

A bientôt.

Mario LITWIN, le 12-10-1999

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